Kombucha Mania

Kombucha Mania entre tradition fermentée et conquête industrielle

Kombucha Mania entre tradition fermentée et conquête industrielle. Née dans les cercles de la fermentation artisanale, la boisson kombucha s’est imposée en quelques années comme un produit emblématique des nouvelles tendances alimentaires. À base de thé sucré fermenté, elle séduit par son profil acidulé, sa pétillance naturelle, et ses effets supposés bénéfiques sur la digestion. D’abord cantonnée aux rayons des magasins bio, elle fait aujourd’hui une entrée remarquée dans les grandes surfaces et les stratégies des géants de l’agroalimentaire. Un retournement qui questionne.

Le succès d’un thé fermenté

L’intérêt croissant pour les boissons sans alcool, à faible teneur en sucre, a joué en faveur du kombucha. Facile à aromatiser, naturellement gazeux, il se prête aussi bien à une consommation quotidienne qu’à une dégustation ponctuelle. À l’instar de la bière artisanale, il a trouvé un second souffle à travers les microbrasseries et les ateliers locaux.

Les chiffres en témoignent : selon les données disponibles, le marché français du kombucha progresse à un rythme soutenu. Les grandes enseignes multiplient les références, tandis que des plateformes spécialisées comme La Fourche misent sur des gammes bio, non pasteurisées, souvent issues de petites structures.

Une boisson à faire soi-même

Au-delà de l’achat, le kombucha est aussi une invitation à l’expérimentation. De nombreux consommateurs apprennent à le fabriquer chez eux, à partir d’un SCOBY (Symbiotic Culture Of Bacteria and Yeast) et d’ingrédients simples. Cette pratique, bien qu’exigeante en précision, s’intègre dans un mouvement plus large de réappropriation des savoir-faire alimentaires. Elle permet aussi d’en maîtriser les paramètres : choix des thés, durée de fermentation, arômes naturels ajoutés.

La valorisation des circuits courts

Certaines marques s’inscrivent dans cette logique de sobriété et de proximité. C’est le cas de « L’eau à la bouche » en Ariège, qui élabore un kombucha vivant, conditionné localement, en travaillant notamment avec des plantes de cueillette. Chez Biocoop, la sélection privilégie les produits artisanaux et sans pasteurisation, gage d’une certaine authenticité.

La Fourche, plateforme engagée pour une alimentation bio plus accessible, commercialise plusieurs références de kombucha comme ceux de la marque Jubiles, aux goûts originaux (gingembre, fruits rouges, citron spiruline…). Ces produits se distinguent par leur faible sucre résiduel et leur méthode de fabrication non industrielle.

Quand l’industrie s’en mêle

Ce succès n’est pas resté sans suite du côté des multinationales. Coca-Cola, entre autres, a fait son entrée sur le marché en acquérant des marques de kombucha déjà implantées à l’international. Ces versions industrielles, souvent pasteurisées et sucrées, posent la question de la transformation d’un produit vivant en boisson de masse.

Le procédé industriel prolonge la durée de conservation, mais supprime aussi les bactéries bénéfiques issues de la fermentation. Quant à l’ajout d’ingrédients comme des concentrés de fruits ou des édulcorants, il éloigne le kombucha de ses principes d’origine.

Réinterroger nos choix

La kombucha mania illustre à merveille les tensions actuelles entre consommation de masse et relocalisation alimentaire. À l’image de nombreuses autres filières, son avenir semble suspendu à la capacité des consommateurs à distinguer entre un produit vivant, local, fait avec soin, et une boisson standardisée dont les qualités sont principalement marketing.

Revenir à des boissons simples, produites localement, voire fabriquées chez soi, peut être une forme de résistance douce à l’uniformisation. Le kombucha n’est ni miraculeux ni insignifiant : il est le reflet de la manière dont nous souhaitons nous nourrir demain.